jeudi 21 avril 2016

Yaoundé : le poulet congelé refait surface

En dépit de la volonté du gouvernement d’éradiquer l’importation de la volaille congelée, la corruption et la porosité des frontières continuent à faire perdurer la contrebande, au détriment du poulet camerounais.
L’on se souvient que la volaille importée a, le temps d’un souffle, été absente des étals, sous l’action conjuguée du gouvernement et de l’Association Citoyenne de défense des intérêts collectifs (Acdic), de Bernard Djongang. Malheureusement, le poulet congelé refait surface. L’enthousiasme lié à l’interdiction de son importation au Cameroun, survenue en 2006, laisse progressivement place à l’inquiétude chez les producteurs locaux. Rien que pour le mois de novembre 2015, plusieurs tonnes de volaille en provenance de la frontière sud du pays ont été saisies à l’entrée de la ville de Yaoundé, sous l’instigation de la Brigade de contrôle et de répression des fraudes du ministère du Commerce. Cette opération qui est intervenue quelques semaines après celle ayant conduit à la saisie et la destruction d’une cargaison de poulet congelé à Douala, vient corroborer les informations persistances faisant état du retour en force de la volaille importée. D’après des informations obtenues auprès de l’Interprofession avicole du Cameroun (Ipavic), au cours du mois de novembre 2015, près de 25 tonnes de découpes de poulet congelé (Cuisses, ailes, pattes, gésiers), ont été saisies, au moment où les propriétaires s’apprêtaient à les écouler sur les différents marchés du pays.



Complicité
Pourtant, l’usager qui emprunte la Nationale numéro 2, partant de la ville de Kyé-Osi pour Yaoundé, est stupéfait de constater la présence de, pas moins de 17 postes de contrôle, constitués entre autres de la Douane, la Police, la Gendarmerie, sans oublier le personnel phytosanitaire du ministère des Pêches et Industries animales (Minepia). D’après nos sources, la persistance de l’importation du poulet congelé au Cameroun, se justifie par une collusion entre les personnels des check-points et les contrebandiers à coup de liasses. En réalité, pour passer entre les mailles du filet, les contrebandiers glissent des pots de vins aux autorités, moyennant leur silence. 

L’économie plombée 
L’interdiction d’importer la volaille congelée au Cameroun, fut considérée par les producteurs locaux comme une bouffée d’oxygène. Cette activité, constitue en effet un frein à l’économie nationale, quand on sait que le pays s’est lancé depuis 2010, vers une dynamique d’émergence escomptée à l’horizon 2035. Selon Jean Claude Fouda Ottou, secrétaire permanent de l’Interprofession avicole du Cameroun (Ipavic) : « En 2013, des producteurs de poussins d’un jour, plus connus sous la dénomination technique d’accouveurs, ont dû, en 10 jours, détruire 260 000 poussins. Cette destruction de poussins visait à éviter des charges supplémentaires de nutrition, à cause du ralentissement d’activité observé chez les fermiers locaux, dont plusieurs ont dû jeter l’éponge à cause de l’envahissement du marché par le poulet congelé importé ».

A en croire ce responsable de l’Ipavic, si l’on considère que chaque poussin est vendu aux fermiers à 400 francs CFA, cela représente une perte sèche de 104 millions de francs CFA pour l’ensemble des accouveurs, rien que pour ce cas. Le retour en force du poulet congelé au Cameroun, laisse donc pantois les producteurs locaux, qui ne savent plus à quel saint se vouer. En attendant que des mesures fortes soient prises dans l’optique de parvenir à une solution, « zéro poulet congelé dans nos marchés », cette denrée alimentaire continue d’aiguiser les papilles gustatives, malgré de multiples risques sanitaires qu’encourent les consommateurs. Il est donc temps de de réapproprier la consommation du « Made in Cameroon », ce d’autant plus que le label est bien prisé ailleurs.

Charles Ndjana, Yaoundé

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